Untitled design

Jeux psychologiques et postures pouvant parasiter la qualité de la relation de travail

Comment pouvons-nous prendre les jeux psychologiques ou les postures qui peuvent émerger dans une équipe, une organisation ou dans une relation interpersonnelle ? Les prévenir avant qu’elles ne parasitent la qualité de la relation de travail ?

1. Identifier pour mieux comprendre.

Chacun d’entre nous dispose de filtres et de références interprétatives qui lui sont propres, à la lumière desquels il appréhende, comprend et réagit au monde qui l’entoure. Ses filtres peuvent se référer à son éducation (ses apprentissages), à sa personnalité… 

De plus, son passé et ses expériences vécues peuvent également s’avérer des clés de compréhension permettant de mieux appréhender ses réactions face à certaines situations. Par exemple, ils peuvent déclencher des rapprochements qui n’auraient pas lieu d’être chez d’autres individus. Il peut arriver que nos croyances entrent en contradiction avec celles de notre entreprise, ainsi nos actions ne seraient-elles, dès lors, plus en accord avec qui nous sommes réellement. 

Notons que, lorsque cela est le cas, il est probable qu’un collaborateur fasse preuve de démotivation, mais souvent, même dans cette configuration, il continue cependant à effectuer son travail. La vraie question est alors de savoir pourquoi sommes-nous amené.e.s à agir en contradiction avec nos propres opinions, même lorsque nous en sommes conscients ? 

De très nombreuses expériences ont été menées, étudiant le rapport de l’individu à l’autorité et l’influence que peut avoir celle-ci sur ses actions. L’expérience de Milgram restant l’une des plus flagrantes. Autorité ne rime, à mon sens, pas avec légitimité mais à l’inverse avec d’autres facteurs tels que la personnalité, les actions ainsi que le rôle de la figure d’autorité. 

2. Des rapports nécessairement inégaux ?

Si hiérarchie rime avec lien de dépendance, qu’en est-il de la soumission à l’autorité ou de la créativité ? C’est là que me semble résider le dosage clé du bon manager. Contrôler et suivre tout en laissant assez de liberté à l’individu pour qu’il se sente autorisé et légitime dans sa prise d’initiative.

Notre rôle de RH apparaît alors de mettre en confiance les collaborateurs pour qu’ils témoignent avec fierté de preuves d’autonomie dans une relation de confiance. Cela nécessite d’être aligné dans nos modes de fonctionnement. Je m’explique : il nous faut reconnaître notre noble place au sein du groupe qu’est l’organisation. Garder en tête qu’un conflit dans un contexte de travail peut être délétère à l’organisation elle-même, aux individus ainsi qu’à la qualité du travail fourni, car elle présente un risque de désengagement. En effet, le risque serait d’entretenir des rapports déséquilibrés. Eric Berne, fondateur de l’analyse transactionnelle a longuement cherché à sensibiliser nos populations sur des enjeux clés de compréhension des rapports humains, applicables dans un contexte organisationnel. 

Pour éviter un tel déséquilibre, commencer par prendre appui sur le factuel permet de garder en tête et de visualiser un objectif rationnel dans un contexte donné. J’ai choisi d’illustrer mon propos par ce schéma qui reprend de manière succincte les différentes positions développées dans le modele d’Eric Berne.  Ainsi existerait-il différents modes relationnels : 

Schéma : « Les positions de vie » du modèle développé par Eric Berne

 +/+ : Dans ce mode relationnel les individus sont en capacité de communiquer positivement et de collaborer de façon adaptée pour avancer dans leurs tâches en vue de la réalisation d’un objectif commun. C’est l’incarnation du ” nous ” et du ” faire ensemble ” en se responsabilisant dans un rapport équilibré, d’égal à égal.

+/- et -/+ : La polarité qui se dégage de ces deux modes relationnels entraîne un rapport déséquilibré dans les relations, pouvant impliquer un rapport de survalorisation/soumission ou de dévalorisation/domination ne permettant pas un mode de communication sain et efficace sur le long terme.

-/- : Ce dernier mode traduit une mise en retrait due à une dévalorisation importante dans laquelle l’individu n’a plus réellement de croyance en sa compétence et n’envisage pas de solutions possibles, qu’il pourrait mettre en place par lui-même. 

Schéma illustrant le « Triangle dramatique » de Karpman

Avec les états du Moi fonctionnel (Parent/Adulte/Enfant), les modes relationnels d’Eric Berne me paraissent être des outils indispensables pour mieux comprendre et agir sur la communication dans les organisations. Les rôles de chacun au sein des organisations ne sont nécessairement pas les mêmes cependant il faut, pour avancer, placer et considérer les individus dans un rapport d’égal à égal comme deux adultes compétents et responsables de ce qu’ils entreprennent. Par ailleurs, nous pouvons aborder le Triangle dramatique de Karpman. En prenant conscience qu’une dynamique particulière peut apparaître au sein des rapports au travail, nous pouvons mieux comprendre comment identifier puis agir sur les déséquilibres entre différents acteurs en évitant de reproduire inlassablement le même schéma. 

3. Rééquilibrer tout ça !

Sur le schéma ci-dessus nous comprenons que pour éviter l’établissement de rapports inégalitaires (et sur le long terme délétères) il faut se pencher sur les différentes postures pouvant émerger au sein des équipes, bien qu’elles puissent apparaître bienveillantes et valorisantes en surface. En tant qu’acteur d’aide au changement nous devons ainsi aider et favoriser un rapport d’égal à l’égal, pour permettre une dégringolade lorsque celui-ci se montre trop inégal. Nous pouvons prendre en exemple la vidéo de l’échange entre Yann Moix et Christiane Taubira, qui lorsqu’elle perçoit l’établissement d’un mode de communication inégale (dû à un abus de soumission à l’autorité) cherche à rétablir un mode de communication plus juste, d’adulte à adulte.

Lien mis à disposition des plus curieux juste ici : https://www.youtube.com/watch?v=q2r68jKbFdw&list=LLNNCU0OwN3vF7v5c0IzABGQ&index=157 

 Il n’est pas présentement question de concevoir tous les individus au même niveau de responsabilités car ce n’est, à mon sens, pas une réalité. Cependant, c’est davantage la possibilité de se montrer apte à considérer que tous les collaborateurs ont le droit d’être traités comme des adultes responsables, soucieux d’effectuer leur travail convenablement mais qui peuvent être soumis à des contraintes extérieures. Il faut donc apprendre à nos collaborateurs à repérer l’installation de ces systèmes puis à pouvoir le désamorcer de façon adaptée, sereine et saine.

Pour cela, nous pouvons notamment tenter de faire prendre conscience à l’individu impliqué de ses propres ressources internes, pour qu’ils puissent en user de manière à s’extraire d’un tel rapport (à titre d’exemple : lui insuffler confiance en ses compétences, en lui-même, lui rappeler qu’il a déjà réalisé de grands projets qui ont, d’un point de vue factuel, correctement fonctionné précédemment). 

En résumé, nous sommes tous acteurs de changement

Un mantra intéressant sur lequel je suis tombée durant mes recherches est le suivant, particulièrement parlant et résumant bien les enjeux: 

“Une des meilleures façons de commencer est d’être le changement que l’on voudrait voir chez les autres. Un persécuteur qui apprend à communiquer sans agressivité, une victime qui prend sa situation en main, un sauveur qui se demande si on l’a appelé à l’aide…”

Moumen, 2013.

La fonction Ressources Humaines (ou Relations Humaines) ainsi que ses acteurs sont de véritables médiateurs, des postes clés. L’enjeu, si nous prenons l’exemple de la gestion de conflit, est de désamorcer ce dernier. Réunir pour entamer un dialogue positif et constructif. Ainsi, pouvons-nous aider à la reformulation et encourager les acteurs impliqués dans l’établissement d’un rapport d’adulte à adulte, égalitaire et bénéfique à long terme. Le  « bon » médiateur, comme nous l’avons abordé, assèche l’inconnu. D’autres notions clés peuvent constituer des outils RH pertinents à utiliser au quotidien. Parmi elles, la communication non-violente, incontournable, dans lequel il est vivement conseillé d’utiliser le pronom “Je” lorsqu’on exprime une sensation, un besoin et une demande. Cela permet de reconnaître que ce ressenti nous appartient personnellement et qu’il n’est pas forcément le reflet de ce que l’interlocuteur souhaitait faire passer comme message.

Auteur : Emma Houchami